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Financement du rail : vers une nouvelle taxe « provisoire » sur les billets de train ?

Pour assurer l’entretien du rail français, une nouvelle taxe « provisoire » sur les billets de train pourrait voir le jour. Une piste examinée à l’occasion de la conférence « Ambition France Transports », alors que SNCF Réseau alerte sur ses besoins de financement, estimés à plus de 4 milliards d’euros dès 2027.

L’idée ne devrait pas ravir les usagers du train. A l’occasion de la conférence « Ambition France Transports », qui s’est ouverte le 5 mai dernier à Marseille pour une durée de dix semaines, une nouvelle piste a été mise sur la table afin de financer l’entretien du réseau ferroviaire français : instaurer une taxe « provisoire » d’un euro par billet. Qualifiée de « légitime et audacieuse » par Gilles Savary, ancien député socialiste et copilote du groupe de travail sur le ferroviaire, la proposition fait pourtant polémique.

« Nous sommes absolument contre le fait de taxer le passager du train. Celui-ci est déjà en France celui qui paye le plus en péages, qui représentent 40 euros sur un billet à 100 euros », a ainsi réagit François Delétraz, président de la Fédération nationale des usagers de transports (Fnaut), auprès des Echos. Avec un coût de 9 euros du kilomètre pour les trains à grande vitesse, les péages ferroviaires français sont en effet parmi les plus chers d’Europe et pèsent lourd sur le budget des voyageurs. A cela s’ajoute une TVA qui représente 10% du prix d’un billet.

1,5 milliard d’euros supplémentaires à partir de 2027

Si l’idée d’une taxe supplémentaire fait son chemin, c’est que les besoins de financement permettant la pérennisation du rail français sont critiques. Au total, SNCF Réseau nécessitera d’ici deux ans 4,5 milliards d’euros par an pour l’entretien et la modernisation des infrastructures, « sous peine de voir le réseau se dégrader et la régularité des trains plonger », avertit Jean-Pierre Farandou, le PDG de la SNCF au micro de BFM TV. Actuellement, 3 milliards d’euros sont déjà investis chaque année, via les péages payés par les compagnies, les subventions versées par l’Etat et une partie des bénéfices de la SNCF réinjectés dans un fonds de concours.

Mais cela ne suffit plus. « L’Etat a sous-investi de façon chronique depuis les années 90 et l’arrivée du TGV », pointe Patricia Perennes, économiste spécialiste du transport ferroviaire interrogée par Novethic. Résultat, durant plusieurs décennies, les voies se sont dégradées, faisant grimper la facture. Selon Jean-Pierre Farandou, « il faudra mettre 1,5 milliard d’euros supplémentaires par an à partir de 2027 ». Si la SNCF envisage d’augmenter sa contribution de 500 millions d’euros, il reste encore un milliard à mobiliser pour maintenir l’ensemble des voies.

En faisant contribuer les usagers à hauteur d’un euro par billet, SNCF Réseau pourrait collecter 800 millions d’euros par an selon une première projection. Cette taxe pourrait par ailleurs ne concerner que les trains du quotidien, comme les TER, pour lesquels les voyageurs ne paient qu’un tiers du coût réel du billet, le reste étant subventionné. « L’avantage, c’est que cette somme serait fléchée », fait valoir Patricia Perennes. « Mais cela veut dire que l’on a renoncé à aller chercher cet argent dans le budget général et que l’on ne va pas avoir de transfert des modes de transports polluants vers les modes décarbonés, ajoute la spécialiste. On considère que ce sont les usagers du train qui doivent payer pour le train. »

« Beaucoup de sources, mais aussi beaucoup de demandes »

Une taxe reposant sur les passagers pourrait ainsi envoyer un message contradictoire à l’heure de la transition écologique. D’autres sources de financement sont donc également étudiées. Les concessions autoroutières, dont le renouvellement n’est néanmoins prévu qu’entre 2031 et 2036, sont régulièrement évoquées, tout comme l’extension du marché carbone européen. Dans une note rédigée à l’occasion de la conférence « Ambition France Transports », le Réseau Action Climat, propose en outre d’augmenter l’écocontribution sur les billets d’avion, d’instaurer une redevance kilométrique poids lourds ou encore de renforcer le malus poids sur les SUV. Combinées, ces mesures permettraient selon l’association de réunir 3,2 milliards d’euros.

Cela sera-t-il assez dans un contexte de rigueur budgétaire ? Rien n’est moins sûr. « Il ne faut pas se voiler la face. Il y a beaucoup de sources, mais aussi beaucoup de demandes, par exemple de la part du réseau routier ou des futurs RER métropolitains, souligne Patricia Perennes. Il s’agira au final d’un choix politique. » Il faudra attendre la fin de la conférence mi-juillet pour connaître les sources de financement retenues. Reste que la situation est extrêmement urgente. « Si rien n’est fait, 2 000 trains risquent d’être impactés quotidiennement dès 2028 par des retards, des travaux inopinés, voire des fermetures ponctuelles », alerte la SNCF dans un rapport. Sur les 30 000 kilomètres de voies ferrées qui sillonnent l’Hexagone, 4 000 kilomètres pourraient ainsi subir un « effondrement irréversible de la qualité de service ». Un chiffre qui pourrait rapidement monter à 10 000 kilomètres dans les dix prochaines années. ■

Source : Novethik, publié le 13 juin 2025

Pour en savoir plus : Pourquoi une conférence sur le financement des mobilités ? – Ambition France Transports, mis à jour le 03 juin 2025

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